Normalité sociale - Étude


Je me permets de partager une étude réalisée en mai 2017 et qui porte sur une stratégie de compensation mise en place par les autistes Asperger et pour lesquelles les femmes sont particulièrement expertes, appelée "le camouflage".

En version originale (anglais) :
En version française :


Commentaire laissé sur l'article de l'AFFA...

"Bonjour,

Merci pour cette traduction, j'y ai trouvé énormément d'éléments intéressants.

Quand j'ai reçu le diagnostic du syndrome d'Asperger, je me suis rapidement sentie concernée par le syndrome de l'imposteur. Regarder dans les yeux, discuter, créer des liens, rire entre copains ("amis" serait beaucoup dire)... Facile. Mais si épuisant...

Regarder dans les yeux me mets mal à l'aise, soit je fixe (trop, et je n'écoute plus), soit je jette des coups d’œil rapides, soit je regarde une autre partie du visage. Je jongle entre plusieurs méthodes pour rendre le tout naturel. Discuter me fatigue, car je parle trop et ne sais pas quand m'arrêter. Quand je suis avec plusieurs personnes, je tiens un moment avant d'avoir envie de partir, simplement, m'éloigner, retrouver le calme, parfois le regard dans le vide, je m'imagine partir sans un mot, mais n'ose pas le faire. Je crée des liens, mais ne les entretiens pas, j'oublie, et puis je ne suis pas à l'aise avec les appels téléphoniques. J'arrive à dire bonjour, à engager la conversation, je me dévoile souvent beaucoup trop, même à des inconnus, mais je n'entretiens pas du tout la relation, au contraire, je m'en veux d'avoir créé un nouveau lien qui m'obligera à socialiser et refaire des efforts si on se croise à nouveau. Je sais rire, j'aime rire, mais certaines blagues me blessent, quand le sarcasme me concerne, certaines blagues m'interpellent, quand elles n'ont pas de sens ou ne sont pas "logiques", certaines blagues tombent mal, etc.

Je me contrôle constamment, je ne sais plus faire marche arrière, je n'ose pas, j'ai peur de ce que je pourrais dévoiler ; ma sensibilité, mes angoisses "pour rien", etc. Souvent, tout ça se transforme en stresse, puis en colère, je deviens nerveuse, je souffle, il faut que je respire. Si j'arrive à me calmer, c'est au prix d'une grosse fatigue.
"Fainéante" "Tu te compliques vraiment la vie"... Comment faire pour MONTRER ce que je vis ? Je ne sais plus comment agir autrement..."


Quelques extraits de l'étude

"[...]

Fondamentalement, l’imitation sociale peut être une forme d’agir, par laquelle les filles présentant une CSA [Condition du Spectre Autistique] non diagnostiquées peuvent faire face sans recevoir de diagnostic ou même sans en avoir besoin ; leur façon d’agir se révélant relativement réussie. Réussir peut se définir ici comme tout simplement ne pas avoir de déficience fonctionnelle patente ou de ne pas éveiller l’inquiétude des enseignants ou d’autres professionnels, même si sous la surface ou en arrière-plan du maintien de telles apparences, les femmes peuvent signaler des niveaux élevés de stress subjectifs, d’anxiété et d’épuisement, et un besoin de se retirer de l’inter action social pour se « ré-initialiser ».

Les individus avec une CSA démontrent également une variation significative dans leurs accomplissements tout au long de la vie, particulièrement en ce qui concerne leur fonctionnement social. Nombre d’adultes établissent des relations et des relations d’amitiés, et ont des carrières enrichissantes qui leur permettent de rester indépendants [...]. D’autres, cependant, luttent pour maintenir des relations sociales et peuvent demeurer sans emploi, en dépit de leurs motivations et de capacités de travail [...]. Bien qu’une partie de cette variation soit due à des différences individuelles en capacités cognitives, en capacité langagière, et aux préférences personnelles [...], il est possible qu’une capacité de l’individu à camoufler sa CSA contribue à ce qu’il atteigne des résultats socialement désirables. Les individus mieux capables de camoufler leurs caractéristiques CSA pourraient se sentir plus à même de se faire des amis, d’améliorer leur soutien social, et de se comporter mieux lors d’entretiens d’embauche.

Les observations comportementales suggèrent que les filles, dans la cour de récréation, camouflent leurs difficultés sociales (e.g., en restant dans une étroite proximité avec leurs pairs et en se faufilant au travers des activités) dans une plus large mesure que les garçons, et par voie de conséquence sont moins susceptibles d’être repérées comme en lutte sur le plan de la socialisation

il y a aussi des conséquences négatives à ne pas apparaître autiste aux yeux d’autrui. Le plus frappant était que chez certains répondants leur camouflage, même s'il était involontaire, entraînait un délai ou l’interrogation de leur diagnostic de CSA. Ceux qui ont répondu ont signalé que parents, enseignants, et mêmes cliniciens professionnels refusaient de croire qu’ils pouvaient présenter une CSA, en particulier lorsqu’il s’agissait de femmes :
"La quantité de filles qui ne sont pas diagnostiquées parce qu'elles sont plus susceptibles de camoufler que les garçons n'est vraiment pas bonne. J'ai consulté si longtemps sans être diagnostiquée parce qu'ils ne savaient pas que je pouvais prétendre être normal !" (Femme, 20)

Pour nombre de répondants, cela reflétait que le camouflage n’est pas un choix conscient ; Ils ont décrit vouloir contrôler quand et comment ils camouflent à un plus fort degré, pour accéder au soutien quand ils en ont besoin :
"Les gens doivent apprendre à laisser tomber le camouflage dans des situations telles que les évaluations médicales ou en face de professionnels du soutien, sinon leurs besoins de soutien peuvent être sous évalués puisqu'ils apparaissent faire face." (Femme, 28)

Comme nous l’avons mentionné précédemment, notre échantillon n’incluait que des adultes au diagnostic confirmé de CSA ; il est par suite possible que ceux qui sont les plus susceptibles de camoufler n’aient pas été inclus dans notre étude parce qu’ils n’auraient pas rempli les critères de diagnostic. Nous n’avons pas inclus un groupe comparatif à développement classique dans cette étude en raison de la difficulté à opérationnaliser le camouflage chez des individus avec des caractéristiques limitées connexes à la CSA. Cependant, plusieurs participants rapportaient avoir pratiqué le camouflage depuis des années, bien avant de recevoir plus tard un diagnostic, suggérant que nos résultats ont une pertinence pour les individus CSA non diagnostiqués.

Cette étude démontre que le camouflage des caractéristiques liées à une CSA en situation sociale peut être un comportement commun aux adultes CSA. Celui-ci trouve sa motivation dans le désir de s’entendre avec les autres et d’établir des liens. Nous pouvons regrouper ces comportements en stratégies de masquage et de compensation. À court terme, le camouflage aboutit à un épuisement extrême et à l’anxiété."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire