Quand j'ai annoncé à quelques proches ma suspicion d'autisme Asperger, on m'a clairement dit que c'était impossible, que j'avais des amis, que j'étais loquace et sociable, que j'avais déjà travaillé, que j'avais fait du théâtre, que j'avais un mari et une fille, etc. et que donc, je ne pouvais pas être autiste Asperger.
Il est vrai que dit comme ça, rien ne laissait penser que je puisse l'être.
Je dois dire qu'au début, j'avais moi-même des doutes. Même si tout semblait coller, "autiste", c'était impossible. On aurait dû le remarquer plus tôt. Et pourtant, je me reconnaissais dans les descriptions types du syndrome d'Asperger. Les listes de traits autistiques typiquement féminins, c'était moi tout craché. De moi enfant, à moi adulte...
Je suis cette femme...
- ... qui a du mal à entretenir ses amitiés,
- qui ne cherche pas à suivre la mode et ne passe pas beaucoup de temps à s’apprêter,
- qui ne trouve rien d'intéressant dans le programme télévisé,
- qui fait plus jeune que son âge, tant par son look, son attitude que physiquement,
- qui adore s'isoler, se plonger dans un roman plutôt que de voir du monde,
- qui a eu des difficultés d'apprentissage à l'école,
- qui ne s'est jamais vraiment intégré à une bande,
- qui n'a jamais aimé les sports d'équipe ni aimé travailler en groupe,
- qui a commencé de nombreuses formations sans aller au bout,
- qui imitait les autres filles à l'école pour être acceptée et avoir des copines - le style vestimentaire, surtout -,
- qui s'est souvent entendu dire à l'adolescence qu'elle était une copieuse sans personnalité,
- qui était souvent la fille bizarre, comparée aux membres de la famille Addams,
- qui était la campagnarde qui aime la nature et les animaux, sauvant araignées, chenilles, guêpes, vers de terre et autres des semelles des autres élèves.
- qui n'aimait pas les camps sportifs ou autres sorties scolaires,
- qui n'arrive pas à se faire une place parmi ses collègues de travail,
- qui n'arrive pas à garder un emploi,
- qui a besoin de mettre en pratique, d'un dessin ou de prendre note pour comprendre une explication,
- qui ne supporte pas l'idée de devoir jouer un rôle pour plaire à la société,
- qui se sent comme une enfant lorsqu'elle est entourée d'adulte, même plus jeunes,
- qui se passionne un peu trop pour certains sujets spécifiques, jusqu'à oublier de manger ou dormir,
- qui peut se lancer à fond sur un projet pour l'abandonner en cours de route,
- qui peine à trouver le sommeil, même lorsqu'elle est épuisée,
- qui cherche par tous les moyens à éviter de sortir de chez elle et à voir du monde,
- qui trouve l'organisation d'une simple sortie trop compliquée,
- qui angoisse à l'idée d'aller quelque part où il y aura du monde,
- qui ne supporte pas de sortir de sa zone de confort,
- qui n'aime pas rencontrer des inconnus,
- qui ressent un soulagement extrême quand un rendez-vous avec quelqu'un est annulé,
- qui semble parfois agressive sans le vouloir,
- qui pose des questions décalées,
- qui n'aime pas les trucs trop féminin - maquillage, romances, mode, bébés, potins... -,
- qui a fait une dépression et qui s'est sentie en décalage toute son adolescence,
- qui a toujours besoin de faire les choses avec une personne de référence,
- qui aime la présence d'une personne proche sans pour autant vouloir échanger avec elle,
- qui ne supporte pas de matière autre que le coton,
- qui est fatiguée par le bruit,
- qui peut être agacée par un son qui semble ne déranger personne,
- qui attrape mal à la tête quand il y a trop de lumière,
- qui se déconnecte souvent de la réalité pour se laisser aller à rêvasser,
- qui fait des listes des choses à faire pour s'y retrouver et s'assurer qu'elle n'oubliera rien,
- qui n'aime pas qu'on interfère dans ses habitudes,
- qui angoisse quand elle ne maîtrise pas ou plus la situation, quand on investit son cocon,
- qui voyait le théâtre comme une forme de bulle sociale dans laquelle les échanges, appris par cœur, étaient enfin corrects,
- qui pense souvent que les gens sont vexés ou en colère - alors que ce n'est pas le cas-,
- qui ne supporte pas qu'on ne suive pas les règles simples de vie en communauté,
- qui se sent blessée facilement quand on la taquine,
- qui prend en pitié les personnes attaquées - même quand elles le "méritent" -,
- qui a tendance à fonctionner avec le principe du tout ou rien,
- qui, parce qu'elle va adopter une souris, s'informe sur tout ce qu'il y a à savoir sur les souris - de l'histoire aux dangers domestique, jusqu'à la génétique -,
- qui, parce qu'elle va adopter un chien, s'informe sur tout ce qu'il y a à savoir sur les chiens - du dressage au langage, en passant par la santé, etc. -,
- qui, parce qu'elle va avoir un enfant, s'informe sur tout ce qu'il y a à savoir sur les enfants - de la psychologie au développement, en passant par les jeux, etc -,
- qui s'émeut, sans le montrer, du moindre compliment,
- qui s'émeut, de manière générale, assez facilement, mais refoule énormément,
- qui aime certains domaines artistiques - dessin, photo, peinture... -,
- qui aime la psychologie, la sociologie,
- qui aime philosopher,
- qui aime l'écriture, les mots, leur signification, leur histoire, leur sens,
- qui fuit le monde réel en imaginant des histoires fictives,
- qui peut écouter en boucle la même musique pendant plusieurs jours d'affilé sans s'en lasser,
- qui, enfant, jouait avec de vieilles serrures et collectionnait les dictionnaires,
- qui a apprit à déchiffrer ses premiers mots seule à 4 ans,
- qui se sent mieux avec des animaux et dans la nature qu'avec des humains en ville,
- qui se couvre les jambes de bleus à force de se cogner ici et là sans plus s'en rendre compte,
- qui n'a jamais éprouvé de tristesse particulière à perdre des amis en déménageant,
- qui n'ose pas appeler ou décrocher au téléphone,
- qui n'aime pas ouvrir la porte au postier ou au livreur de pizza,
- qui stresse à l'idée de recevoir beaucoup de monde chez elle,
- qui n'aime pas les visites surprises ou les gens qui ont de l'avance,
- qui parle toute seule,
- qui marche en regardant le sol,
- qui ne regarde jamais vraiment dans les yeux, mais plutôt la bouche, la racines des cheveux ou un peu partout autour de la tête,
- qui, quand elle essaie de maintenir le regard dans les yeux, perd le fil de ce qui est dit et n'entend plus les paroles,
- qui réclame parfois des choses comme une enfant,
- qui sautille de joie quand quelque chose lui fait plaisir,
- qui ne comprend pas l'utilité de dire "s'il vous plait",
- qui a parfois tendance à dévoiler sa vie privée à des inconnus,
- qui peine à extérioriser ce qu'elle ressent ou ce qu'elle vit,
- qui se force à parler avec les gens jusqu'à s'entendre dire qu'elle parle trop,
- qui ne comprend pas pourquoi les gens se compliquent la vie avec des règles de société pesantes,
- qui peine à prendre des nouvelles des gens qu'elle aime même si elle y pense tous les jours,
- qui coupe la parole,
- qui revient sur le sujet qu'elle n'a pas pu terminer,
- qui s'emporte quand on ne l'écoute pas,
- qui n'aime pas quand on lui dit qu'elle a tort alors qu'elle sait qu'elle a raison,
- qui n'aime pas quand les débats s'enveniment,
- qui s'enferme dans un mutisme quand la discussion la dépasse,
- qui a besoin de s'isoler quand elle est trop en colère,
- qui ne sait pas expliquer les choses de façon concise,
- qui a du mal à expliquer les choses tout court,
- qui cherche parfois à comprendre des choses là où il n'y a rien comprendre,
- qui porte de l'importance aux détails,
- qui analyse énormément tout ce qui l'entoure,
- qui... etc.
Tout ça, ce sont des traits typiques de femmes Asperger...
Et c'est bien moi tout ça.
Personne ne peut dire le contraire...
Évidemment, n'importe qui peut se retrouver dans ces définitions, mais la différence entre une personne dite NT (neurotypique) et une personne Asperger se situe dans l'intensité des ressentis, le fait que ce soit constant, de l'enfance à la vie d'adulte, et cumuler autant de caractéristiques.
Malgré ça, pourquoi ça ne se voit pas ?
Premièrement, parce que je le cache, au prix d'un épuisement qui me vaut régulièrement des remarques. mais aussi parce que j'ai la chance incroyable d'avoir un cadre de vie idéal pour ne pas avoir à faire trop d'effort. Je suis mère au foyer, sans emploi, un mari qui m'aime et accepte parfaitement cette situation, c'est même lui qui a fini par me l'imposer car je tenais à travailler, même si cela me déprimait. Je ne sors pas faire les courses, mon mari accepte également qu'on passe par la livraison à domicile.
Ce n'est évidemment pas parfait, sitôt qu'il faut aller voir des amis, c'est comme une pierre qui me tombe sur la tête, c'est compliqué, ça ne me réjouis pas, j'espère toujours une annulation de dernière minute. On a déménagé hors de la ville, mais malgré ça il y a toujours beaucoup de bruit avec le passage incessant des voitures, les tondeuses, les bus, les tracteurs, etc. Je dois régulièrement ouvrir au postier pour réceptionner des paquets. C'est pénible, mais je préfère ça à devoir aller à la poste. Il faut parfois que j'aille faire une petite course, mais c'est rare et mon mari, mon héro, s'en chargera la plupart du temps. On me propose parfois de sortir de chez moi pour une balade, un café, ou autre, et je m'empêtre dans des excuses bidons pour ne pas avoir à dire "c'est trop compliqué pour moi", excuse souvent mal prise par la personne d'en face.
Malgré ça, je suis bien et je ne vis plus si souvent de situations de stresse qui m'obligent à me fermer au monde, être dans ma bulle, cet état qui fait que je ne vois personne et qu'on me reproche après de ne pas avoir répondu l'autre jour quand j'étais au magasin et qu'on m'a salué.
Il y a quelques rares personnes qui n'engendrent pas de stresse en moi, même quand elles passent à l'improviste. Ces personnes sont mes parents, ma sœur, ma meilleure amie, et bien évidemment, mon mari (qui n'est pas concerné par le passage à l'improviste, cela va de soi). Mais leur présence peut malgré tout parfois me rendre nerveuse quand cela ne va pas dans le sens que je l'aurais souhaité.
Ces quelques rares personnes sont les seules qui m'importent réellement, même si je ne pense pas toujours à les contacter ou à prendre des nouvelles, cela ne m'empêche pas de penser à elles tout le temps.
Je dois avouer que pour toutes les autres personnes, l'entretient des rapports est un effort, quelque chose à laquelle je dois penser, pratiquement avec un rappel, comme on sait qu'on doit faire sa déclaration d'impôt, c'est chiant, mais faut le faire... Non pas que je ne les apprécie pas, au contraire, mais parce que... J'y pense pas, simplement. Ou alors je crains qu'un petit message comme ça n'entraîne une longue discussion que je n'ai pas envie de tenir. Si on essaie de m'appeler, c'est vite vu, je ne décroche pas, même si j'ai mon téléphone dans ma main.
Si ces personnes me proposent d'aller boire un verre, je dis "oui oui", mais ne fais rien pour concrétiser la proposition. Tout comme ça peut me faire très plaisir de croiser quelqu'un que je n'ai pas vu depuis longtemps, mais n'éprouver aucune envie de discuter de tout ce qui a pu se passer entre temps. Je sais que ça se fait, alors je lance la discussion, et ça dure, et je ne sais plus comment m'arrêter, je réponds, ce qui engendre une nouvelle question à laquelle je réponds encore, je m'ennuie, peut-être que je vais poser une question aussi, histoire de faire comme l'autre - "et toi... ?" - mais les réponses ne m'intéressent pas vraiment, surtout que c'est souvent toujours la même chose - "Oh bah, toujours les mêmes soucis de boulot..." -, et pourtant je les écoute avec attention, comme si on allait me questionner dessus plus tard. Je ne sais pas quand m'arrêter et je passe un moment terrible où j'ai l'impression que tout le monde s'ennuie mais se force.
Alors oui, c'est difficile et fatigant tout ça pour moi, mais comme, par chance, ma vie ne m'y confronte pas souvent, cela ne se voit pas et je le vis relativement bien.
Et c'est bien moi tout ça.
Personne ne peut dire le contraire...
Évidemment, n'importe qui peut se retrouver dans ces définitions, mais la différence entre une personne dite NT (neurotypique) et une personne Asperger se situe dans l'intensité des ressentis, le fait que ce soit constant, de l'enfance à la vie d'adulte, et cumuler autant de caractéristiques.
Malgré ça, pourquoi ça ne se voit pas ?
Premièrement, parce que je le cache, au prix d'un épuisement qui me vaut régulièrement des remarques. mais aussi parce que j'ai la chance incroyable d'avoir un cadre de vie idéal pour ne pas avoir à faire trop d'effort. Je suis mère au foyer, sans emploi, un mari qui m'aime et accepte parfaitement cette situation, c'est même lui qui a fini par me l'imposer car je tenais à travailler, même si cela me déprimait. Je ne sors pas faire les courses, mon mari accepte également qu'on passe par la livraison à domicile.
Ce n'est évidemment pas parfait, sitôt qu'il faut aller voir des amis, c'est comme une pierre qui me tombe sur la tête, c'est compliqué, ça ne me réjouis pas, j'espère toujours une annulation de dernière minute. On a déménagé hors de la ville, mais malgré ça il y a toujours beaucoup de bruit avec le passage incessant des voitures, les tondeuses, les bus, les tracteurs, etc. Je dois régulièrement ouvrir au postier pour réceptionner des paquets. C'est pénible, mais je préfère ça à devoir aller à la poste. Il faut parfois que j'aille faire une petite course, mais c'est rare et mon mari, mon héro, s'en chargera la plupart du temps. On me propose parfois de sortir de chez moi pour une balade, un café, ou autre, et je m'empêtre dans des excuses bidons pour ne pas avoir à dire "c'est trop compliqué pour moi", excuse souvent mal prise par la personne d'en face.
Malgré ça, je suis bien et je ne vis plus si souvent de situations de stresse qui m'obligent à me fermer au monde, être dans ma bulle, cet état qui fait que je ne vois personne et qu'on me reproche après de ne pas avoir répondu l'autre jour quand j'étais au magasin et qu'on m'a salué.
Il y a quelques rares personnes qui n'engendrent pas de stresse en moi, même quand elles passent à l'improviste. Ces personnes sont mes parents, ma sœur, ma meilleure amie, et bien évidemment, mon mari (qui n'est pas concerné par le passage à l'improviste, cela va de soi). Mais leur présence peut malgré tout parfois me rendre nerveuse quand cela ne va pas dans le sens que je l'aurais souhaité.
Ces quelques rares personnes sont les seules qui m'importent réellement, même si je ne pense pas toujours à les contacter ou à prendre des nouvelles, cela ne m'empêche pas de penser à elles tout le temps.
Je dois avouer que pour toutes les autres personnes, l'entretient des rapports est un effort, quelque chose à laquelle je dois penser, pratiquement avec un rappel, comme on sait qu'on doit faire sa déclaration d'impôt, c'est chiant, mais faut le faire... Non pas que je ne les apprécie pas, au contraire, mais parce que... J'y pense pas, simplement. Ou alors je crains qu'un petit message comme ça n'entraîne une longue discussion que je n'ai pas envie de tenir. Si on essaie de m'appeler, c'est vite vu, je ne décroche pas, même si j'ai mon téléphone dans ma main.
Si ces personnes me proposent d'aller boire un verre, je dis "oui oui", mais ne fais rien pour concrétiser la proposition. Tout comme ça peut me faire très plaisir de croiser quelqu'un que je n'ai pas vu depuis longtemps, mais n'éprouver aucune envie de discuter de tout ce qui a pu se passer entre temps. Je sais que ça se fait, alors je lance la discussion, et ça dure, et je ne sais plus comment m'arrêter, je réponds, ce qui engendre une nouvelle question à laquelle je réponds encore, je m'ennuie, peut-être que je vais poser une question aussi, histoire de faire comme l'autre - "et toi... ?" - mais les réponses ne m'intéressent pas vraiment, surtout que c'est souvent toujours la même chose - "Oh bah, toujours les mêmes soucis de boulot..." -, et pourtant je les écoute avec attention, comme si on allait me questionner dessus plus tard. Je ne sais pas quand m'arrêter et je passe un moment terrible où j'ai l'impression que tout le monde s'ennuie mais se force.
Alors oui, c'est difficile et fatigant tout ça pour moi, mais comme, par chance, ma vie ne m'y confronte pas souvent, cela ne se voit pas et je le vis relativement bien.
Hello !
RépondreSupprimerCette liste ne me concerne que moi et est donc inspirée uniquement de ma vie, mais elle a effectivement été inspirée par les listes proposées par Rudy Simone, Samantha Craft et Tony Attwood que j'ai regroupé à ce lien :
http://planete-aspie.blogspot.ch/p/aspergirl.html
Il n'existe pas de liste officielle des traits autistiques féminins car nous sommes toutes différentes, là où certaines ont de grosses difficultés, cela sera facile pour d'autres, et vice-versa. Certains traits sont "contournés" depuis tellement de temps que la personne peut ne même plus se rendre compte qu'elle le "corrige" continuellement, au prix d'une grosse fatigue dont elle ignore, du coup, la cause, etc.
Attention également à l'effet Barnum (dont je parle ici : http://planete-aspie.blogspot.ch/2017/12/eviter-leffet-barnum.html) car les caractéristiques du SA peuvent sembler communes et correspondre à tout en chacun, cependant, il faut se poser la question de la durée et de l'intensité de chaque trait autistique.
J'espère que ça répond à ta question :)
Merci pour ton commentaire !