Le monde du travail

 

Je sais d'avance qu'avec cet article je vais passer pour une idiote aux yeux des personnes dites neurotypiques, autrement dit "normales", parce que les arguments qui vont être avancés ici comme problème à l'emploi sembleront ridicules. J'ai d'ailleurs eu droit à mon lot de remarques lourdes à porter suite à ces arguments que je servais de façon allégée à mon entourage quand on me poussait à chercher du travail. J'avais honte de certains d'entre eux que je pensais inadmissibles - et je savais ce que j'aurais risqué à les exprimer - mais pour ceux que je me permettais d'annoncer, ils me semblaient tellement logiques que je ne comprenais pas qu'on me contredise, je ne comprenais pas que les gens puissent trouver ça "normal".

La recherche de travail est, en soi, en défi, ou un jeu basé sur des mensonges de la part des deux camps - employeur et demandeur d'emploi - dont je n'arrive pas à saisir les règles ni le principe.


"Cherche Super Héros pour vider les poubelles"

C'est là que, personnellement, je me retrouve face à mon premier problème. On peut chercher par genre d'emploi, par région, par spécialisation... Mais quand on n'a aucun diplôme, qu'on cherche un peu tout ce qui "traine" et qui est accessible, on cherche où ? Et puis ne pas avoir de diplôme ne veut rien dire, je sais trier des documents, j'ai pas besoin d'une formation pour ça. Je suis capable d'énormément de choses, mais je ne sais absolument pas comment chercher quelque chose qui puisse correspondre. Alors quand je vois le site d'annonces afficher fièrement qu'il propose plus de 500'000 annonces, je désespère en me demandant si ça vaut vraiment la peine de toutes les lire... Je fais un peu de tri en retirant les domaines qui ne m'intéressent vraiment pas, mais cela ne réduit généralement pas énormément.

Ensuite, quand on lit les annonces, il y a de quoi être démoralisé... Quand on voit qu'il faut être jeune, avoir une présentation implacable, une parfaite maîtrise du français parlé et écrit, ainsi qu'une excellente compréhension de l'anglais (et allemand, et pourquoi pas aussi portugais et chinois... et russe... et...), être à l'aise autant en équipe qu'individuellement, être flexible, autonome, souriant/e, discret/e, polyvalent/e, structuré/e, organisé/e, avec bonne communication, apprécier le contact humain (emplois en rapport avec de la clientèle), savoir faire preuve d'initiative (tout en sachant obéir aux ordres sans se plaindre), avoir de l'expérience dans un domaine similaire (de plusieurs - très nombreuses - années), maîtrise totale de la suite Office (principalement Word et Excel), connaissance en graphisme/design (pour se rendre compte que c'est juste pour mettre en page le journal interne...), connaissance du logiciel MachinChose ou BiduleChouette (logiciel privé de l'entreprise) un plus, savoir se servir d'une machine à café (j'en rajoute un peu)... Ceci dit, nous n'en sommes pas loin.

J'ai même découvert le terme "entregent" qui signifie "Habileté à établir des contacts utiles en société."(source Linternaute). Je pense que s'il existe un antonyme à "Autisme" ce doit bien être "entregent" !


"Vous êtes honnête ? C'est mal !"

Quand on cherche un boulot, on prend ce qu'il y a. Certaines personnes ont la chance de pouvoir faire un peu les difficiles, elles ont des spécifications et des diplômes qui leur permettent d'être exigeantes. Mais ce n'est de loin pas le cas de tous. La plupart cherchent "un travail", n'importe quoi tant que ça rapporte des sous (si en plus le boulot n'est pas trop pénible, les horaires un peu cool et l'ambiance sympa, c'est le top !). Grand nombre de personnes ont un métier juste pour payer le loyer, la bouffe et les factures. Donc quand on ne peut pas faire le difficile, on prend ce qu'on trouve.
Imaginons que le hasard nous mette devant le nez un emploi dont on se sent la capacité de le réaliser haut la main : Un emploi à 80% comme nettoyeur de cendrier dans une entreprise de robotique ? Ça se tente ! Donc il faut faire une lettre de motivation... Sauf que... Je ne sais absolument pas comment expliquer ma motivation autrement que "Bonjour, j'ai besoin d'argent pour vivre, n'ayant pas de diplôme et donc étant dans l'incapacité de prouver mes compétences, je postule où je peux et je pense être tout à fait apte à remplir les conditions exigées pour cet emploi". Mais une telle lettre ne passerait pas. Alors on se retrouve à écrire des conneries (oui, je sais, je suis vulgaire, c'est l'effet "sujet travail") du genre "Passionnée par la robotique depuis l'enfance, j'ai toujours souhaité intégrer une entreprise d'une renommée telle que la vôtre..." Gna gna gna... Pour nettoyer des cendriers, c'est pas sérieux ! Mais même si l'employeur n'y croit pas non plus, il préfère qu'on le flatte dans le sens du poil, et cette capacité à le flatter - ainsi qu'à mentir - est, au premier abord, bien vue, mais c'est une capacité dont il faut user uniquement pour prétendre au poste. Mentir, c'est mal.

Personnellement, j'ai très souvent joué la carte de l'honnêteté, un peu dans l'espoir :
1) d'éviter l'étape de l'entretien en recevant directement une lettre de refus,
2) si entretient il y a, que ce soit sur une base honnête.


"Vous avez de [trop] nombreuses qualifications..."

Mais avant ça, parlons du CV, cette liste plus ou moins propre et chronologique sur laquelle on énumère tout ce qu'on a fait de notre vie et qui peut sembler utile (même les passions et loisirs). C'est en général là, aussi, qu'on se rend compte si notre vie est considérée comme riche ou pauvre selon les critères de société. Être un skieur passionné, c'est génial ! On imagine un sportif sain de corps et d'esprit, qui n'a pas peur de prendre des risques et qui aime l'action. Être PGM (Pro Gamer Master) en FPS (First-Person Shooter), c'est ringard, voire méprisable. On pense que la personne est solitaire, limite antisociale, geek et malsaine, pas tout à fait équilibrée...

En ce qui me concerne, j'ai un CV de trois pages si j'y mets tout ce que j'ai fait niveau stages, formations, apprentissages, activités professionnelles et bénévoles, sans écrire bien gros. Si j'ajoute mes passions et connaissances informatiques, je peux compter cinq pages, je peux monter à six ou sept si je développe chaque activité, etc. Mais comme un CV ne doit pas faire plus d'une page (sauf si CV exceptionnel), je retire le maximum, tout ce qui date de plus de cinq ans, tout ce qui est descriptions, précisions, etc. Les activités sont complètement hétéroclites : entre les stages de menuiserie, de décoratrice paysagiste, les apprentissages de libraire, réalisatrice publicitaire, les formations de designer de l'information, de RH, les emplois de serveuse, télévendeuse, secrétaire, comptable... Je sais parfaitement ce que cela reflète : une personne peu fiable.

Alors j’essayais de mettre en avant ce qui est du même domaine, c'est là que des trous de forment dans la chronologie, et qu'on fait disparaître les mois pour ne plus afficher que les années. Mais je suis hésitante. Est-ce que je mets en avant mes connaissances dans le design, le graphisme, la pub, la photo, car j'aime ça, mais je doute grandement de mes capacités qui ne sont plus du tout à jour, où est-ce que je mets en avant mes emplois de secrétariat, comptable, classer des documents, ouvrir le courrier, ce genre de trucs pas trop compliqués qui offre parfois une certaine tranquillité, mais dont j'ai horreur ?

Peu importe, de toute façon, ce qui ressort en général sur mon CV (et que je m'obstinais à laisser, du coup, en espérant que ça fasse mouche) ce sont mes années d'improvisation théâtrale. Visiblement, le fait de savoir jouer la comédie était un plus pour de nombreux employeurs. Qu'importe, ça me permettait de décrocher un entretien, alors je le laissais (aussi invraisemblable que ça puisse paraître).

Je doute qu'il y ait beaucoup de monde qui corresponde vraiment à la demande, vu le genre de profil décrit dans les annonces. Voilà pourquoi on se retrouve à se sentir obligé de mentir si on veut absolument décrocher un entretien (juste un entretient qui n'engage à rien !). Mais il faut savoir doser parce qu'en face, l'employeur devra aussi voir ses exigences à la baisse.


"Bonjour, on fait un bras de fer ?"

C'est là que commence le spectacle de savoir qui osera dire qu'il a menti sur ses attentes/qualités... Le demandeur d'emploi devra-t-il dire qu'il n'est pas vraiment polyvalent ou est-ce que l'employeur osera dire le premier qu'il n'est pas réellement indispensable d'être pro en graphisme et que le russe n'est que rarement utilisé - et uniquement par échange de mails, donc Google trad' fait bien l'affaire - ? Qui parlera le premier ? Qui lâchera le morceau le premier ? En général, c'est l'employeur qui doit céder, sans quoi, l'autre repart avec un "merci beaucoup, on vous rappellera" qui signifie généralement "laissez tomber, on doit pouvoir trouver mieux". Et si l'autre est engagé, il s'engage surtout à tenir sa couverture d'employé modèle la durée de son temps d'essai, une période où on s'obstine à venir avec la chemise repassée, le sourire aux lèvres, et où les idées nouvelles de classement de facture fusent par centaines. Après quoi, le masque tombe...

Là encore, en ce qui me concerne, je ne mentais jamais sur mes compétences. Je mettais bien en avant l'argument que je peux tout apprendre si on me montre et que je deviens alors rapidement autonome. Mais en revanche, je mentais complètement sur ma motivation qui était généralement proche de zéro. Quelle grande comédienne je faisais. Effectivement, les cours d'improvisation étaient effectivement un plus. J'étais crédible, pratiquement à chaque fois ! Je ne sais même pas pourquoi, alors que j'avais la hantise de décrocher un emploi.


C'est pas possible d'accepter ça !

Pourquoi travailler est une telle hantise pour moi ? Non, ce n'est pas par flemme. Non, je n'aspire pas à passer mes journées à regarder la télévision. Non, je n'aime pas particulièrement être dépendante financièrement. Et non, ce n'est pas parce que je ne gagne pas d'argent que je suis inactive.

Pratiquement à chaque fois que j'ai décroché un emploi, j'ai eu envie de pleurer. Pleurer de panique, d'angoisse, de contrariété. Quand j'ai pu, je l'ai fait, mais souvent je ne pouvais pas. Tant de personnes semblaient heureuses pour moi, me félicitant d'avoir décroché un travail, comme si c'était le but ultime de nos vies, je ne pouvais pas me permettre de montrer que, de mon côté, j'étais horrifiée par la nouvelle, mais sincèrement horrifiée. C'était une horrible nouvelle pour moi. Je l'entendais un peu comme "Ta vie est finie"...

Qu'importe l'horaire, pour moi, chaque instant passé au travail ou à me rendre au travail, c'était de la perte de temps, du temps perdu à ne pas pouvoir m'épanouir, créer, imaginer, me laisser vivre, tout simplement. Mais étant quelqu'un du soir, j'avoue préférer perdre mon temps le matin... Ce qui prouve que ce n'est pas l'envie de faire la grâce matinée qui me bloque, car jamais je n'aurais pu accepter un travail dont les horaires auraient été les après-midi ou en soirées. Pour moi, cela aurait voulu dire que je n'avais tout bonnement plus de vie, que je devenais l'esclave de mon travail. Sans compter que commencer une journée de travail après midi me stresse horriblement, je ne saurais pas expliquer pourquoi. Ça me fait peser une déprime d'une lourdeur insupportable sur les épaules en prime !

Je disais une fois que je trouvais l'expression "gagner sa vie" absolument monstrueuse. Je peux sembler mielleuse, mais n'est-ce pas notre mère qui nous offre la vie ? À quel moment est-ce qu'on nous la vole pour qu'on doive passer notre temps à la gagner à nouveau - pour ne jamais vraiment la récupérer d'ailleurs - ? Je n'a pas à gagner ma vie ! Ma vie, je l'ai, elle m'appartient, et je ne veux pas en faire cadeau à qui que ce soit, surtout si ce n'est pas pour satisfaire un but qui me convienne. Je ne parle pas d'être égoïste, il y a plein d'activités altruistes qui me plaisent, mais pas si ce sont des obligations, rien que ça.
J'ai trop besoin de sortir tout ce que j'ai dans la tête, tellement que je ne peux m'empêcher, après un temps de bonne impression, de mettre le travail de côté pour me pencher sur des projets privés, malgré moi. C'est vraiment plus fort que moi, je n'arrive pas, sur le long terme, à rester focalisée sur les tâches qui me sont assignées.

Ensuite, il y a toutes les simagrées autour du monde du travail, le comportement, les sourires, la tenue vestimentaire, l'interdiction d'être soi, de refléter sa vraie personnalité pour être à l'image de l'entreprise qui nous engage. Par exemple, porter des jeans est extrêmement mal vu dans le monde du service (restauration, vente en magasin, bureau d'accueil, etc.) pourtant combien de personnes portent des jeans dans le privé ? Et si le travail est bien fait, qu'est-ce qu'on peut bien en avoir à faire de la tenue de la personne qui nous sert ? Ça me dépasse...
On me dit que ce n'est pas la mer à boire, mais franchement, pour moi, si. On peut me dire quarante fois qu'il y a de jolis pantalons noirs qui font très classe dans telle boutique, ou qu'une jupe ça m'irait bien, je suis désolée, mais m'y plier, c'est trop me demander. J'ai peu d'habits, des habits dans lesquels je me sens à l'aise. Devoir acheter des habits pour le travail, je trouve totalement aberrant, je ne suis pas payée pour financer ce qui est utile au travail. Si en plus il y a une exigence de style (et de matière), c'est plus possible. Je ne supporte pratiquement rien d'autre que le coton, et encore, tout dépend la température. S'il fait froid, je ne supporte pas les bas, même en coton, ni les pantalons trop serrés. S'il fait chaud, j'ai besoin de porter des trucs légers et amples, et uniquement en coton, etc. bref. Autant dire qu'une tenue imposée, c'est vite problématique pour moi (ou alors un tablier. Ça passe un tablier, ça j'accepte).

Sans parler du fait qu'en tant que professionnel, l'erreur est interdite, nous ne sommes plus des êtres humains, nous sommes des machines qui doivent tout savoir, tout faire, et rapidement s'il vous plait (le monde est pressé en plus) !
On ne peut laisser filer la moindre hésitation, ni même la moindre émotion. Interdiction d'avoir des états d'âme. T'as passé une mauvaise journée ? Tu t'es fait/e largué/e par ta moitié ? Ton chat est mort ? Pire, un membre de ta famille ? Tout le monde s'en fout, y a du boulot, faut qu'il soit fait. Ok, va pour une journée de repos, parce qu'on sait très bien qu'une rupture, un deuil, ou même un rhume, ça se règle en journée à peine.
Désolée, mais je n'arrive pas à entrer dans le jeu, je n'arrive pas à oublier que je suis un être humain avec des besoins, et non, non, NON ! je n'arrive pas à me dire "C'est la vie, faut s'y plier" parce que non, ce n'est pas "la vie", et non, je n'ai pas à m'y plier parce qu'on me le demande. C'est en acceptant ce genre de situation ridicule qu'on en fait une norme, qu'on la banalise et qu'on finit par dire aux personnes qui refusent de s'y plier qu'ils sont compliqués et exigeants.
Alors oui, j'ai perdu des emplois en voulant simplement rester moi, humaine, avec des sentiments, des imperfections, des jours avec et des jours sans...

Évidemment, je ne parle même pas de tout ce qui est relation à la clientèle. Les clients se prennent pour des rois, la plupart ne respectent rien, si par hasard on tombe sur quelqu'un de sympathique, c'est le jour où soi-même on est de mauvais poil ou alors on voit cette personne comme un sauveur et on pourrait pleurer tant elle illumine notre journée, notre semaine même.

Je m'efforce de respecter les codes sociaux de base, bonjour, excusez-moi, merci beaucoup, bonne fin de journée, etc. Mais visiblement, il serait plus adapter d'envoyer bouler tout le monde, déclarer haut et fort "je veux et j'exige". Face à ça, je ne me fatigue pas à faire des efforts, mais cela finit toujours par m'être reproché. Faire ce que le client ne fait pas, autrement dit : rester polie, rester aimable, souriante et patiente, ne pas se respecter soi-même, accepter d'être traitée comme moins que rien, pourquoi pas même se faire lancer une petite insulte... Parfait.

Mais parfois, il n'y a pas de client. Il n'y a que les collègues, ceux qui semblent se connaître depuis dix ans, tous, même celui qui a commencé une semaine après nous, alors que nous, on regarde de loin, on essaie de participer, on remercie celui ou celle qui à tenté de nous poser une question pour nous aider à intégrer la conversation, mais on manque la perche et on reste à l'écart.
Ou alors, situation inverse, j'essaie, je parle et je parle trop, je ne sais plus quand il faut s'arrêter, je m'épuise moi-même, je donne beaucoup trop de moi, tout le monde pense que je suis hyper bavarde alors qu'en vrai, pas du tout, mais du coup, on me parle, beaucoup, trop, chaque contact avec un/e collègue devient un échange épuisant et sans fin que je ne maîtrise pas, qui s'éternise... Le pire moment pour ça c'est quand c'est la fin de la journée, l'heure tant attendue qui sonne la fin du travail, cette heure qui nous fait bondir hors de notre chaise alors que les autres semblent s'efforcer de faire bonne impression en restant quelques minutes.
Heures ? Mais ils sont fous ? N'ont-ils pas de vie ? De famille ? De passions... ?
Visiblement pas...

Je pourrais développer encore avec mon horreur des appels téléphoniques. Le fait de ne pas savoir à qui je parle, cette peur de parler dans le vide, de mal comprendre, etc. même si, quelque part, ne pas faire face à la personne m'arrange également. En fait, je crois que je n'ai simplement pas envie d'avoir affaire à quelqu'un que je ne connais pas du tout. C'est stressant. Et j'ai besoin d'être seule pour parler au téléphone, je suis terriblement mal à l'aise de téléphoner devant un public, j'ai l'impression d'être ridicule car en définitive, je parle à "une boîte", je parle seule, je réponds dans le vent. Et puis je fais les mille pas et ça me donne la nausée.

Je pourrais également parler de ce besoin de temps pour m'adapter psychologiquement à l'idée que je vais commencer à travailler. Être libre de suite ou un poste à pourvoir au plus vite est une vraie source de panique pour moi. Je suis toujours dans la crainte du commencer "dès demain". C'est horriblement angoissant pour moi. Même si je l'ai toujours caché, même si j'ai toujours fait passer ça pour de la contrariété ou de la frustration. J'aime pouvoir me faire doucement à l'idée que la liberté, c'est terminé, pouvoir mettre au propre mes projets, prévoir comment je ferai le trajet.

En parlant de trajet, j'adore les trajets en transports publics, quand ceux-ci sont relativement vides et/ou calmes. Si y a plein de monde, faire le trajet debout, être bousculée, les enfants qui crient, les jeunes qui rigolent, écoutent leur musique à fond (même si c'est dans un casque), celle qui parle fort parce que son mari est sourd, et surtout ceux qui commencent, allez savoir pourquoi, à me parler ! Je ne veux pas parler ! J'ai un livre dans les mains, ce n'est pas parce que je suis déprimée à l'idée d'être seule, c'est bien parce que je veux être tranquille, je suis bien dans mon histoire ! Mais non, y a régulièrement un ou une pour venir taper la discut'. Et j'avoue que je ne sais jamais quoi répondre, je me surprends à raconter ma vie alors que je n'ai absolument aucune envie de me confier à cette personne, et encore moins à toutes les autres qui nous écoutent, en douce. Mais j'ai l'impression de ne plus me contrôler. Je suis en "mode automatique" et mon subconscient cherche des réponses à donner malgré moi, quitte à ce que ce soit indiscret. Tout ça parce que je n'ose pas dire "Pardon, mais je n'ai pas envie de discuter"... Pourquoi est-ce si difficile à dire ? D'où vient cette peur de vexer l'inconnu alors que l'inconnu se s'inquiète pas de nous embarrasser ?

Après, il y a tout ce qui est autorité, hiérarchie, etc. On peut dire que je suis respectueuse des "rangs" parce que... En réalité, je m'en fiche complètement. Je respecte tout le monde par principe. Le concierge autant que le grand patron. Donc du coup, je passe pour respectueuse de la hiérarchie. Mais il ne faut pas commencer à me demander de faire des choses complètement illogiques ou inutiles. Je ne vais pas m'empêcher de le signaler, ce qui est, évidemment, très mal vu, et surtout mal interprété. Je ne remets pas en question les compétences d'une personne, je me permets juste de croire que personne n'est parfait et qu'il arrive à tout le monde d'avoir des idées (ou des exigences) pas forcément des plus adéquates. Mais les gens n'aiment pas être mis en porte-à-faux, se remettre en question, surtout par une personne "de rang inférieur".

Etc.

Donc voilà, je sais que dit comme ça, ça n'a l'air de rien, mais jouer la comédie dans le milieu du travail, c'est vraiment trop me demander, je ne tiens pas, je n'ai pas la force. Je n'ai pas envie de voir les gens, je n'arrive pas à me concentrer sur ma tâche, j'ai l'esprit complètement ailleurs, malgré moi, besoin de penser, rêver, me réaliser, créer, lire, écrire, apprendre... Classer et faire de faux sourires, je peux pas. C'est pesant au point que j'en arrive à pleurer.
Combien de fois me suis-je enfermée aux toilettes à mes boulots pour pleurer, parce que la pression était trop forte, parce qu'on me reprochait d'être dans la lune, de ne pas faire, de ne pas être efficace...
Alors que s'il y a bien une chose qu'on ne peut pas me reprocher, c'est mon efficacité. La seule chose, c'est qu'elle était "mal" utilisée, car je ne faisais que ce qui était demandé, et pas plus. Si je devais m'occuper d'une pile de documents pour la journée, c'était fait en 20 minutes, et j'utilisais le reste de ma journée "pour moi". Du coup, on pensait que je glandais toute la journée, mais le travail était fait. Après, il ne fallait bien sûr pas compter sur moi pour demander plus de travail, pour signaler que je m'ennuie ou autre. Non, j'avais d'autres choses à faire. Évidemment, si j'avais utilisé mon potentiel au rythme auquel j'étais capable de l'utiliser, j'aurais fait des miracles (oui, je suis modeste...), mais voilà, ce potentiel, je ne voulais pas le consacrer à quelque chose qui ne me plait pas, ne me convient pas (l'utiliser pour mes passions et IS, c'est une autre histoire, je me perds également, mais pour d'autres raisons...).

Alors aussi stupides à vos yeux que puissent être mes raisons de ne pas travailler, les voici. Elles sont ce qu'elles sont, et elles sont réellement pesantes. Car oui, j'aimerais aimer travailler, avoir une bonne équipe de travail, rigoler à la cafétéria, apprécier m'occuper de ma pile de dossiers, avoir un salaire et ne pas toujours dépendre d'une autre personne. Mais voilà...

Et visiblement, je ne suis pas la seule...

2 commentaires:

  1. Très bien cet article. Ca me donne envie de lire les autres. Pour ce qui est du petit jeu de l'embauche (CV et lettre de motivation, entretien) je me demande ce que ça peut bien rapporter aux neurotypiques quand tout le monde ment et que tout le monde sait que tout le monde ment. Effectivement, est-ce que ce ne serait pas plus facile de diffuser une annonce du genre "On demande une personne courageuse pour nettoyer des cendriers" ? Bonne continuation.

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    1. Je dois avouer que ce sont des choses qui me dépassent et de loin. Ce hypocrisie qui règnent dans de nombreux domaine et tout particulièrement celui du travail, je n'arrive non seulement pas à comprendre mais encore moins à faire pareil, je suis incapable de faire semblant que ça doit être pris pour vrai, alors que pourtant, j'ai fait du théâtre et de l'improvisation théâtrale, mais c'est un univers où en fin de compte, on peut être qui on veut, et être "bizarre" est fortement encouragé, donc c'était plus facile pour moi :p

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